Bivouac solođŸ’ƒđŸ»

HĂŽtel cinq Ă©toiles.

« Mais tu n’as pas peur de randonner et dormir seule, dans la nature ? Â»

Je ne supporte plus cette question, qui m’est posĂ©e par des femmes, des hommes, des proches et des inconnus.

PARCE QUE je risque plus de me faire agresser en rentrant seule chez moi en pleine nuit qu’en randonnant au fin fond du Mercantour.
C’est dramatique et affligeant mais c’est la triste vĂ©ritĂ©.

PARCE QU’en France, le risque de se faire attaquer par un animal sauvage est trĂšs trĂšs trĂšs trĂšs faible. Soyons honnĂȘtes : nous zigouillons tout ce qui bouge, personne n’a vraiment envie de s’approcher de nous.
Ça aussi c’est affligeant d’ailleurs.

PARCE QUE c’est Ă  cause de ce type de questions que de nombreuses femmes n’osent pas fouler les sentiers seules. Alors qu’elles le veulent. Je le sais, j’en connais une dizaine qui ont Ă©tĂ© dĂ©couragĂ©es ou effrayĂ©es par des proches leur prĂ©disant moultes mĂ©saventures rocambolesques et ont finalement dĂ©cidĂ© de ranger leur sac Ă  dos aussi sec.
C’est Ă©galement affligeant parce que marcher seule (ou seul d’ailleurs), c’est un moyen incroyable de se connaĂźtre, gagner en confiance en soi et se sentir libre.

PARCE QUE je suis certaine que, si j’étais un homme, jamais on ne me poserait cette question. Sous-entendu qu’un homme pourrait plus facilement « survivre Â» (pour rappel, on parle de randonner en forĂȘt, on se calme) dans la nature vierge et hostile qu’une femme

Affligeant.

Sur les Hauts Plateaux du Vercors, réveillée par un écureuil.

C’est en acceptant ce type de discours qu’on accepte par la mĂȘme occasion les diffĂ©rences de salaires, la place de la femme dans la sociĂ©tĂ©, les plafonds de verre, etc. Je mĂ©lange tout ? C’est possible, mais pour moi, cette question ouvre la porte Ă  tout un tas de prĂ©suppositions extrĂȘmement dangereuses.

Et considĂ©rer cette question comme normale (car elle Ă©mane la plupart du temps d’une bonne intention), c’est planter une graine dans la tĂȘte de beaucoup de femmes.

Une petite graine dĂ©vastatrice qui nous susurre Ă  l’oreille que nous ne sommes pas Ă  la hauteur, que nous ne sommes pas Ă  notre place dehors, que ce n’est pas pour nous, que c’est trop dangereux. Que nous ferions mieux d’abandonner avant mĂȘme d’avoir essayĂ©.

En tant que parent, ami, proche, collĂšgue, bref, en tant que membre de la sociĂ©tĂ©, nous avons tous une responsabilitĂ© Ă  ce sujet. ArrĂȘtons de nous Ă©tonner (voire de nous inquiĂ©ter) quand une femme - peu importe son Ăąge - dĂ©cide de partir seule.

Ravalons nos craintes et posons-nous juste la question : aurions-nous rĂ©agi de la sorte s’il s’était agi d’un homme ?

PS : non, nous ne sommes pas le 8 mars. Je pense que la libertĂ© de la femme Ă  disposer de ses mollets mĂ©rite d’ĂȘtre abordĂ©e plus d’une fois par an.

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