Antarctique #4
Récit en quelques épisodes d’une aventure hors du commun de deux mois, sur un petit voilier perdu dans les glaces. Aussi haletant que votre série Netflix préférée.
Ep 4 : Marguerite, nous voilà ! 🌼
Après un mois en mer, bercés/chahutés par la houle, nous avons atteint la belle baie Marguerite.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle a su se faire désirer : la navigation ces derniers jours n’a pas été un long fleuve tranquille. 😅
Le temps polaire – terme politiquement correct pour dire humide et froid – s’est maintenu. J’ai donc décidé d’arrêter de parler de "mauvais temps" car, après un mois de brume, de neige et de pluie, je réalise que le gris peut être beau. Le brouillard est d’ailleurs très adapté à cette région, dont les reliefs gardent une part de mystère, lorsque nous les approchons sans les voir.
Et puis le ciel bleu, c’est surfait. (On n’y croit pas)
Les icebergs sont dorénavant omniprésents. Les mastodontes ne sont pas les plus complexes à gérer : on les voit venir et on a le temps de changer de cap. Les plus sournois sont les glaçons qui sortent à peine la tête de l’eau, se confondent avec l’écume et d’un coup tentent de jouer aux auto tamponneuses avec le bateau.
Pour s’occuper sur le pont, nous parions entre nous sur la taille et la trajectoire des morceaux de glace qui s’approchent. Pour le moment, nous avons été meilleurs que pour les pronostics de la coupe du monde de football. Espérons que cela dure.🤞
Les mouillages étant de plus en plus rock’n roll, nous avons instauré des quarts de nuit. Quand on se retrouve seul face à l’immensité entre 1h30 et 3h du matin, on a le temps d’entamer un dialogue assez intéressant avec les icebergs qui nous entourent.
Une espèce d’équilibre de la terreur s’instaure : on espère que chacun restera tranquillement à sa place, au moins jusqu’à ce qu’on retrouve la sécurité de sa couchette ! 😴
La météo capricieuse nous contraint aussi à prendre notre temps… Quel luxe ! Dépendants du bon vouloir des vents et des glaces, nous acceptons sans rechigner une journée supplémentaire au mouillage. L’occasion de s’ennuyer – attitude que nous gagnerions à développer – ou de suivre un cours sur les aurores australes, dispensé par notre chef d’expédition. Son travail consistait à les étudier sur une base en Antarctique.
Si on m’avait dit à 18 ans qu’un tel job existait, mon choix d’études aurait été un poil différent… 🤓
Mais lorsqu’on les conçoit autrement que comme des dangers, les icebergs sont avant tout de sublimes sculptures éphémères. Leurs formes, les sons qu’ils produisent, leurs couleurs, leur texture….
Tout nous laisse rêveurs chez eux. Leur incroyable force et leur magnifique fragilité ne peut que nous émouvoir.
Coté faune, nous avons fait la connaissance des incroyables éléphants de mer. 🐘
Ces monstres sont capables de plonger à 2km de profondeur mais aussi de produire les sons les moins appétissants jamais entendus.
Prendre une photo d’eux sans bave ou morve au nez relève de l’exploit…
Notre descente vers le Sud s’achève donc aujourd’hui mais l’aventure et les découvertes qui l’accompagnent dureront encore un mois. 🤩